Il n’a pas apprécié le procès d’intention fait à l’ordre des avocats dans le cadre de la mission d’évaluation des dispositifs de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, qu’effectuaient des experts du fonds monétaire international (FMI) en Cote d’Ivoire. Il, c’est le Bâtonnier de l’ordre des Avocats de Côte d’Ivoire, Maitre Mentenon. Au cours d’une conférence de presse qu’il a animé le mardi 29 juin 2022 au siège de l’ordre des avocats à Cocody 2 Plateaux, le Bâtonnier a déploré le fait que certaines langues tendaient à faire croire que l’ordre des avocats s’était opposé au processus d’évaluation de la délégation du FMI arrivée en Côte d’Ivoire. Et cela non sans avoir fait des précisions de taille.

« La lutte contre le blanchiment de capitaux le financement du terrorisme demeure une préoccupation pour le Barreau… »

Cette mission du FMI a séjourné en Côte d’Ivoire du 5 au 25 juin 2022. Elle était là pour échanger directement avec certains acteurs nationaux aussi bien du secteur public que privé sur les questions relatives à la conformité technique du dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Et ce, sur les 40 recommandations du groupe d’action financière ainsi que les résultats obtenus dans sa mise en œuvre. Cette mission d’évaluation devait rencontrer et échanger avec plusieurs hauts responsables de structures aussi bien étatiques que non-gouvernementales. Parmi ces structures figurait en bonne place l’Ordre des Avocats. Qui avait d’ailleurs reçu son invitation par la correspondance de la cellule Nationale de Traitement des Informations Financières (CENTIF). Si l’Ordre des Avocats avait pris acte des termes de la correspondance du président de la CENTIF, par la voix du Bâtonnier Maitre Mentenon, il a cependant voulu comprendre « La consistance ou l’objet de cette évaluation » et la « justification du lieu des échanges ». Dès cet instant, d’autres correspondances vont être émises entre l’Ordre des Avocats et la CENTIF. Le premier cité n’étant pas visiblement satisfait des arguments qui justifiaient le choix du lieu de l’évaluation, attendait d’autres réponses. Ces exigences ont suffi pour que l’Ordre des Avocats soit soupçonné de vouloir éviter ces échanges avec les experts du FMI. Accusation à laquelle le Bâtonnier Maitre Mentenon a réagi en ces termes : « L’Ordre des Avocats fait fermement valoir que les avocats n’ont jamais entendu s’opposer au déroulement de l’évaluation mutuelle du dispositif de la Cote d’Ivoire pour la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ». Et le bâtonnier de rassurer que l’Ordre des Avocats s’est toujours rendu disponible sur les questions de blanchiment de capitaux. C’est d’ailleurs pour cela qu’il n’a pas manqué de dire que : « La lutte contre le blanchiment de capitaux le financement du terrorisme demeure une préoccupation pour le Barreau dont le conseil  actuel s’est fixé pour mission de veiller au respect scrupuleux des règles de déontologie gouvernant l’exercice de notre profession, régie désormais par le règlement l’UEMOA n°5/CM/UEMOA relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’Avocat (…)». Et lui d’ajouter que : « le règlement d’exécution N°002/2018/COM/UEMOA relatif à la Caisse Autonome de Règlement Pécuniaire de l’Avocat (CARPA) prescrit en son article 8 que s’il est procédé à un dépôt en espèces, l’Avocat devra agir conformément à la loi relative à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme dans son pays (…) Mieux l’article 9 indique que la CARPA peut refuser toute opération suspecte ou illicite, de même qu’elle peut demander sur autorisation du Bâtonnier, des explications ou justifications sans qu’on ne lui oppose le secret professionnel (…) ».

Pour Maitre Mentenon, « ces instruments confirment bien que la lutte contre le blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme est au cœur de l’exercice de notre profession, relativement au maniement de fonds (…) Les avocats de Côte d’Ivoire n’ont absolument rien à cacher… ».

« Dans le cadre de leur profession, les Avocats sont tenus de recevoir leurs interlocuteurs au lieu de leurs domiciles professionnels… »

Ces raisons ont été évoquées dans l’exposé liminaire du conférencier du jour qui a fait savoir ceci : « L’Ordre des Avocats est une institution régie par un règlement sous régional et qui dispose d’un siège abritant le bureau de Monsieur le Bâtonnier et plusieurs pièces dont l’évidente fonctionnalité permet la tenue de rencontres de toute nature, puisque les réunions du Conseil de l’Ordre ainsi que les séances de formation initiales et continue des Avocats s’y déroulent. Dans le cadre de leur profession, les Avocats sont tenus de recevoir leurs interlocuteurs au lieu de leurs domiciles professionnels. Les raisons de sécurité ajoutées aux règles de voyage des fonctionnaires du FMI, de mobilité, de gestion de temps, de situation géographique en conformité avec les standards du FMI, telles qu’évoquées par la CENTIF dans sa correspondance du 09 juin 2022, ne résistent pas à l’analyse puisque malgré ces raisons occultes de sécurité, cette délégation a tout de même effectué en Côte d’Ivoire plutôt que s’en abstenir…Le choix de cet hôtel, bien que résultant d’une décision commune de l’Etat et de l’équipe de l’évaluation, ne saurait lier l’Ordre des Avocats, absolument tiers « oenitus extranei » et pour lequel l’Etat n’a pu valablement stipuler ».

En dépit de ces observations et autres réserves, et dans le cadre de cette seconde phase, ces évaluations mutuelles des dispositifs ont finalement eu lieu. Et le Bâtonnier de confier que : « Le Barreau a sacrifié à l’interview avec les membres de la délégation du FMI le vendredi 24 juin 2022, par vidéoconférence. Initialement prévue pour une durée de quarante-cinq minutes, l’interview des Avocats s’est tenue de 15 heures à 18 heures et demie, soit plus de 3 heures d’horloge, confirmant ainsi l’excellente qualité des échanges et l’intérêt réciproque de chaque partie à ce sujet ».